Fiche pratique

L’importation d’armes par des particuliers.

vendredi 6 janvier 2017, par Jean-Jacques BUIGNE membre du CA de la FPVA

S’il est un sport que les particuliers aiment bien pratiquer dans tous les domaines, c’est le circuit court. Ainsi, il évite la cascade d’importateurs, distributeurs et détaillants, pour faire baisser son prix de revient de l’objet qu’il convoite.
Mais comme nous allons le voir, si l’importation est juridiquement possible pour un particulier, c’est aussi une aventure qui n’est pas toujours intéressante financièrement. Beaucoup choisissent simplement de passer par leur armurier.

Il faut voir plusieurs aspects : s’il s’agit d’armes en provenance de l’un des 28 Etats Européen, c’est un transfert d’armes. Et si l’arme vient d’un autre pays que les Etats européens, c’est une importation. Pour cette dernière les formalités sont différentes selon qu’il s’agit d’armes classées en catégorie B, d’armes de catégorie C ou D1, d’armes anciennes de catégorie D2, de répliques ou autre armes.

Les transferts : provenance d’un des 28 Etats d’Europe

Concernant les armes de catégorie D2, qu’elles soient anciennes ou répliques, pas de formalité particulière. Pour les armes neutralisées, il suffit d’avoir le certificat européen de neutralisation.
L’Europe est une zone de libre circulation des biens et des personnes mais le régime des armes est un peu particulier pour les catégories B, C et D1 dont le transfert est réservée aux tireurs ou chasseurs.

Il est bien évident que les titulaires de la carte européenne d’armes à feu peuvent se déplacer avec les armes qui sont inscrites dessus, dans la mesure où ils justifient que le déplacement est fait à titre sportif.
C’est donc le problème de l’expédition d’un pays européen vers la France que nous allons traiter.

Un permis de transfert

Les armes de catégorie B, C ou D1 qui vous sont expédiées doivent être accompagnées d’un permis de transfert que l’expéditeur obtient de son administration. Il reprend les caractéristiques des armes concernées par le transfert.

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Les CERFA sont à télécharger :
Accord préalable et sa notice pour le remplissage.
Bien que vous n’en ayez pas besoin, vu que c’est le pays exportateur qui va le délivrer, le permis de transfert et sa notice pour le remplissage.

Pour obtenir ce permis de transfert, votre expéditeur vous demandera un accord préalable délivré par les douanes françaises. Vous trouverez le formulaire sur Internet, Cerfa N° 11290*02 ainsi que la notice d’explications pour le remplissage. Bien entendu, vous devrez fournir votre autorisation, licence de tir tamponnée par le médecin et CNI.
Le retour du document se fait sous un maximum de 15 jours. Quand vous avez votre accord préalable, vous l’envoyer à l’armurier exportateur avec votre CNI ou passeport, et licence tamponnée, il se charge de toutes les formalités dans son pays. Notamment l’obtention du permis de transfert c’est le document qui accompagnera le colis durant tout son trajet. Voir la notice pour le remplissage.
- Voir article.

Pour le transfert d’une catégorie B. Il faut évidemment demander au préalable une autorisation à la préfecture. Elle doit être jointe à le demande d’accord préalable.
Un fois l’arme reçu, il faut renvoyer à la préfecture le volet n°2 complété avec les caractéristiques de l’arme et du permis de transfert. C’est à ce moment que s’effectue la mise à jour de l’autorisation.
A noter qu’en cas d’achat à un particulier, il est conseillé de faire parvenir une copie de la cession a l’administration arme, du pays émetteur. Par exemple pour la Belgique, le Registre Central des armes [1]
Voir aussi les articles sur l’importation et la carte européenne d’arme à feu.

Une catégorie différente


Là où il peut y avoir une difficulté, c’est lorsque l’arme est classée dans une catégorie différente en France et dans le pays exportateur. Par exemple, un revolver mle 1873 est classé « arme de collection » donc libre en France, et soumis à autorisation en Allemagne. Impossible pour le collectionneur français de fournir un accord préalable. La douane française n’en délivre pas pour des armes de catégorie D2. Et l’administration allemande l’exige pour délivrer son permis de transfert. Dans ce cas, il y a deux solutions : soit un courrier de votre part suffit à expliquer avec pédagogie à l’administration du pays expéditeur que c’est libre en France ; soit, si cela n’est pas suffisant, il faut une attestation d’expert pour expliquer la chose. Et cette attestation est payante et parfois cela suffit à faire perdre l’intérêt d’acheter dans un autre Etat.

Les exceptions

La règlementation exempte certaines armes des formalités de transfert : Il s’agit des armes d’épaule à percussion annulaire, et leur éléments. Ainsi que des des munitions et éléments des catégories C et D.

Les importations : provenance d’un pays tiers à l’UE

Les armes de catégorie B

Avant toute chose, il faut demander aux services des douanes une autorisation d’importation de matériels de guerre, armes et munitions (AIMG) au service des douanes. On trouve sur Internet le Cerfa n°11192 et la notice pour le remplir. Il s’agit d’un PDF actif que l’on peut remplir en ligne. Il faut l’envoyer en 4 exemplaires originaux avec copie de CNI, de licence de tir ou du permis de chasser validé ainsi que de son autorisation.
Comme justificatif, le particulier doit fournir une autorisation vierge. Dans la pratique, il y a une petite contradiction sur le fait que l’AIMG est valable un an et l’autorisation d’acquisition est valable trois mois. Si l’importation traîne en longueur il y a lieu de demander à la préfecture la prolongation qui n’est encore que de trois mois.
Lors de la demande, il faut préciser le bureau de douane où se dérouleront les formalités. Ce bureau va recevoir un exemplaire de contrôle qu’il rapprochera de l’exemplaire importateur.
Ce sont les mêmes formalités que ce soit des armes, munitions ou éléments d’armes.

Jusqu’au 6 septembre 2013, il fallait suivre la procédure de l’AIMG pour les baïonnettes considérées alors comme armes blanches. Alors qu’elles ne sont plus classées, la vie du collectionneur est bien plus simple.

Les armes de catégorie C ou D1

Comme pour la catégorie B, il faut une AIMG. Mais il y a des exceptions pour les tireurs ou chasseurs qui voyagent avec leurs armes pour des raisons sportives et qui sont titulaires de la carte européenne d’armes à feu.
Sont dispensées d’AIMG :
- Les armes d’épaule à percussion annulaire ainsi que les munitions,
- Les étuis vides (non chargés et non amorcés) ainsi que les projectiles.

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Les agents des douanes ont rang d’OPJ pour la constatation des délits
sur les armes à feu.

A noter que l’AIMG ou le permis de transfert sont un des éléments du dédouanement, restent à accomplir les formalités classiques de dédouanement avec, le cas échéant, TVA et droits de douane. Ces taxes ne sont dues que pour les importations, c’est à dire ce qui provient d’un autre pays que les 28 Etats Européens. Ce qui provient de la Communauté Européenne n’est pas soumis à des formalités de dédouanement ni au paiement de taxes.
- Voir article.

Voir article sur l’importation.

Les armes de catégorie D2

Il est intéressant de savoir que les armes en provenance d’un des 28 Etat européens ne sont soumises à aucune formalité particulière. Mais par les temps qui courent, les colis sont parfois radiographiés et il y a méprise sur le contenu ; cela produit des quiproquos kafkaïens. Cela a été le cas pour un simple pistolet lance-fusée qui a été envoyé à Bourges.
Si le principe est que l’importation d’armes de collection est libre, il y a des modalités particulières. Et il n’est pas possible de les faire inscrire sur la Carte européenne d’armes à feu.

Les armes anciennes

L’administration veut vérifier qu’il s’agit bien d’armes d’un modèle antérieur à 1900 ou présente sur la liste complémentaire. Pour cela, les dédouanements se font exclusivement au centre régional de Bourges. Le service de l’ETBS vérifie le classement et délivre une attestation qui est nécessaire au dédouanement.
Le passage à Bourges a un coût qui peut être dissuasif pour le dédouanement d’une seule arme. Voir article.

Les reproductions d’armes anciennes

Le modèle doit avoir déjà été homologué par Bourges. Pour un professionnel qui importe un gros lot de répliques, cela se fait sur la présentation d’un échantillon. Mais pour un particulier qui importe une seule arme, cela peut être une procédure lourde. Soit le service de douane d’entrée du colis est cool et le dédouanement s’effectue facilement. Soit il exige une attestation de Bourges qui doit, en principe, déjà connaître le modèle.

Les armes neutralisées

Avec le nouveau règlement européen, les neutralisations pratiquées dans un autre Etat (l’un des 28) est reconnue en France depuis le 6 avril 2016 et à condition de bénéficier d’un certificat de neutralisation émis depuis cette date.
Mais pour ce qui provient d’un pays tiers à l’Europe, il faut que la neutralisation soit pratiquée dans l’un des 28 pays. Le français qui veut importer des armes à neutraliser doit les faire adresser au Banc d’Epreuve de St-Etienne qui les stocke dans un entrepôt sous douane. Les armes sont neutralisées et dédouanées ensuite. C’est simple, mais d’un coût hors de proportion pour une petite quantité d’armes.

Mise à jour d’AGRIPPA des armes transférées ou importées

Après l’entrée en France, il faut penser à la mise à jour du fichier AGRIPPA auprès de la préfecture.

- Pour les catégorie C et D1, il faudra envoyer à la Prefecture le Cerfa, ainsi des les documents adéquates. [2] Il faut joindre selon le cas, le permis de transfert ou l’AIMG. C’est a ce moment la que l’enregistrement est opéré sur Agrippa.

- S’agissant de catégorie B, logiquement c’est l’armurier vendeur qui rempli le volet n°2 et le renvoi à la prefecture. Le problème est que chaque pays a ses propres règles. Par exemple en Belgique, c’est l’acheteur (et non l’armurier) qui doit présenter le volet B de son modèle 4 ou 9 aux forces de l’ordre avec l’arme. Et ce sont ces dernières qui remplissent le document d’acquisition pour le renvoyer au Registre centrale des armes.
Ainsi, nous donnons conseil aux acquéreurs trans-frontalier de renvoyer le volet n°2 aux service arme de la préfecture avec le permis de transfert ou l’AIMG. Il faut effectuer cette formalité, que l’arme ait été livrée ou qu’elle soit encore en cours de transport. Ainsi, la mise à jour de l’autorisation se passe très bien.

Service des Douanes en matière d’armes
Direction Générale des Douanes et Droits Indirects
Sous-direction du Commerce International
Bureau E2 : Prohibitions et Protection du Consommateur
11, rue des deux Communes - 93558 MONTREUIL Cedex
01 57 53 43 98 - mail : dg-e2@douane.finances.gouv.fr
La direction des douanes donne facilement des renseignements aux importateurs qui sont un peu perdus dans le système.
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Le lance-fusée d’aviation mle 1918,
les frais d’importation que
le collectionneur a déboursé
sont fort élevés.



Exemple d’un coût prohibitif

Un de nos correspondants vient de faire une drôle d’expérience en important un lance-fusée français mle 1918 en provenance des USA.
Le prix d’achat de 400 $ du lance-fusée est très raisonnable compte tenu du modèle rarissime. On le trouve aux USA parce qu’il a peut être été donné par la France au titre de compensation des frais de guerre. Mais le collectionneur a eu pour plus de 400 € de frais de douanes et diverses formalités.
Voilà comment le transport s’est effectué. Une fois arrivé à Orly, le colis a été redirigé sur Bourges bien qu’il s’agisse d’une arme classée en catégorie D2 du paragraphe i), c’est à dire arme à blanc ou de signalisation. La douane ne sait pas classer une arme et en cas d’incertitude seul l’ETBS de Bourges est capable de classer officiellement l’arme dans une catégorie prévue par la loi. Donc, même si c’est juridiquement inutile pour un lance-fusée, pratiquement les lance-fusées doivent être vus par Bourges.
Mais tout cela engendre des coûts supplémentaires. Déjà le port des USA était de 60 €, il faut rajouter 16 € de droits de douane, 150 € pour l’intervention de l’agent en douane et 50 € pour le reconditionnement du colis après ouverture. Cerise sur le gâteau, il y a 105 € de TVA douanière. De 20 %, elle se calcule sur le prix initial de l’objet, le transport et une partie des frais engendrés sous douane. A noter que s’il s’était agit d’un objet de plus de cent ans d’âge, le taux de TVA aurait été de 5,5 %, donc elle aurait été de 29 € au lieu de105 €.

- Consulter la notice des douane résumant l’ensemble des formalités d’import et d’export.

[1Service des Armes - Place de la Cathédrale 16/2 - 4000 Liège Belgique. Mail - Tél : 04/220.51.3.

[2Permis de chasser validé ou licence de tir tamponnée par le médecin, ainsi qu’une pièce d’identité.