La Carte Grise n’est pas un titre de propriété

samedi 1er janvier 2022, par Vice président FPVA

Bien qu’établi au nom du propriétaire du véhicule, la « Carte Grise » (ou certificat d’immatriculation) n’est pas un titre de propriété !

Comme chacun le sait, tous les véhicules terrestres à moteur (voiture particulière, 2 roues et scooter, y compris de moins de 50 cm3, moto, quad, cyclomoteur, tricycle, quadricycle, camping-car, camionnette, tracteur et autre engin agricole), ainsi que les remorques dont le PTAC est supérieur à 500 kg (y compris les remorques agricoles), doivent être immatriculés pour pouvoir circuler sur la voie publique.
La Carte Grise comporte notamment : le numéro d’immatriculation, l’identité du propriétaire du véhicule, les caractéristiques du véhicule, sa conformité (visites techniques...), la date de première immatriculation.

Toutefois, le fait d’avoir en sa possession une carte grise à son nom ne signifie pas que la personne est propriétaire du véhicule. En ce sens, l’article 2 de l’arrêté du 5 novembre 1984 modifié par l’arrêté du 17 avril 1991 précise : « La carte grise, bien qu’établie au nom du propriétaire du véhicule (personne physique ou morale ou jouissant de la personnalité morale) ne peut en aucun cas être considérée comme un titre de propriété. Elle est un titre de police ayant pour but d’identifier un véhicule et dont la détention est obligatoire pour la mise ou le maintien en circulation dudit véhicule sur les voies ouvertes à la circulation publique ».
L’article R.322-2 du Code de la Route ajoute « Un certificat d’immatriculation, dit carte grise, établi dans les conditions fixées par le ministre chargé des transports, après avis du ministre de l’intérieur, est remis au propriétaire ; ce certificat indique le numéro d’immatriculation assigné au véhicule ».

Dès lors, selon l’État, une Carte Grise est simplement un titre officiel qui justifie qu’un véhicule est autorisé à circuler sur la voie publique (titre de circulation), ce qui permet son identification (via l’apposition de la plaque d’immatriculation correspondante) et donc de rendre responsable du paiement des PV du véhicule, le titulaire de la carte grise qui doit détenir un permis de conduire l’autorisant à conduire ledit véhicule.
En effet, lorsque le propriétaire ne détient pas le permis de conduire correspondant au véhicule à immatriculer, il doit désigner un conducteur principal détenant le permis adéquat qui devra apparaître sur le certificat d’immatriculation faute de quoi l’immatriculation pourra être refusée par les autorités, ce qui explique aujourd’hui, notamment pour les poids lourds et les motos de collection qui ne roulent pas, que leur certificat d’immatriculation ne soit pas systématiquement modifié à chaque vente faute de pouvoir l’être compte tenu d’une norme tatillonne et inadaptée à la collection.

On notera d’ailleurs que, sur le fameux papier gris délivré par la préfecture et aujourd’hui l’ANTS, porte l’intitulé "certificat d’immatriculation", mais qu’auparavant, il s’appelait simplement "déclaration de mise en circulation de véhicule automobile". Ainsi, il s’agit bien d’une autorisation de circuler qui induit une présomption de possession et par conséquent de propriété.
Toutefois, la propriété elle résulte, s’il s’agit d’un véhicule neuf de la présentation d’une facture d’achat. Si c’est un véhicule d’occasion de la présentation d’un certificat de cession accompagné d’un certificat de non-gage et de non-opposition et de l’ancienne carte grise découpée dans sa partie supérieure droite et revêtue de la mention vendu le .. / .. / .., accompagnée de la signature du vendeur (Si le propriétaire ne possède pas ces pièces justificatives, il peut également présenter un relevé bancaire ou d’un bon de commande qui prouve qu’une transaction a bien été opérée entre l’acquéreur et le vendeur).

C’est donc seulement ensuite et sous un délai de quinze jours suivant le transfert de propriété, que les articles R. 322-4 et R 322-5 du Code de la Route imposent à l’acheteur d’immatriculer son véhicule s’il souhaite le maintenir en circulation.
A cela il convient d’ajouter que dans les documents à produire devant les services de la préfecture, l’article R 322-5 oblige que l’acheteur accompagne sa demande d’immatriculation notamment d’une attestation certifiant la mutation du véhicule.
Ainsi, le titre de propriété apparaît manifestement résulter du contrat de vente entre le vendeur et l’acheteur, la carte grise n’étant somme toute que la traduction administrative de la délivrance de la chose vendue dont elle constitue l’accessoire. Probablement parce qu’il est possible de mettre la carte grise au nom d’un tiers, et de se mettre en co titulaire lorsqu’on n’a pas le permis requis. En effet, le titulaire principal de la carte grise doit être détenteur du permis l’autorisant à conduire le véhicule à immatriculer.

En effet, selon l’article 1582 du Code Civil, la vente est une convention par laquelle l’un s’oblige à livrer une chose et l’autre à la payer. Or s’il est par ailleurs précisé que la vente peut être constatée par un acte sous seing privé tel un bon de commande ou un certificat de cession, l’article 1615 de ce même Code Civil ajoute que l’obligation de délivrer la chose comprend ses accessoires et tout ce qui a été destiné à son usage perpétuel, en l’occurrence la carte grise.
D’autre part, il convient de remarquer qu’un véhicule automobile est juridiquement considéré comme un bien meuble, or aux termes des dispositions de l’article 2279 du Code Civil, en fait de meubles, la possession vaut titre, et l’article 2228 d’ajouter la possession est la détention ou la jouissance d’une chose ou d’un droit.

Toutefois, contrairement aux autres meubles, un véhicule automobile est un meuble d’un type particulier puisque immatriculé. Ainsi, il a été jugé que la remise des documents administratifs relatifs au véhicule vendu (carte grise) constitue une obligation contractuelle essentielle et que la remise d’une carte grise falsifiée, constitue un défaut de délivrance de la chose vendu [1].
En conséquence, il apparaît que si la carte grise ne constitue pas un titre de propriété, elle en est l’accessoire et à ce titre est indissociable du contrat de vente qui, lui, constitue-le titre de propriété.
Dès lors s’explique la confusion entre les deux notions, ainsi que la présomption de possession et donc de propriété qu’engendre la présentation de la carte grise par le conducteur du véhicule lorsqu’elle est à son nom.

Voir aussi :
- Demande de carte grise de véhicule de collection et contrôle technique,
- Quand faut il une carte grise de collection et un contrôle technique ?

[1Civ. 1ère 29 mai 1996 : Bull. civ. I, n° 230, … voir sous art. 1615 c. civ. A. 1.